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Simone Awards 2020
Rencontre avec Shelby Meyers

L’association Landscape For Humanity utilise le paysage comme base fondamentale de travail pour créer des espaces de vie responsables, à destination des personnes dans le besoin. En tant que directrice exécutive, Shelby Meyers travaille au plus près des communautés pour répondre à leurs besoins précis.

Shelby, pouvez-vous nous parler de votre parcours?

De manière assez générale, j’ai la chance de faire un travail qui me passionne, à savoir créer des jardins et des paysages en travaillant au plus près des communautés. Je suis convaincue que la meilleure façon de rassembler des populations, c’est de les faire travailler sur des projets intéressants et responsabilisants. C’est une expérience incroyable de voir une communauté se construire autour de projets concrets comme la mise en place de jardins et paysages. C’est un message fort, surtout en ces temps si difficiles.

Comment vous êtes-vous lancée dans ce projet d’accompagner les communautés ?

J’ai fait mes études de paysagisme à l’Université d’Oregon, dans la ville d’Eugene. Après mon diplôme, en 2016, j’ai décidé de rester au sein de la communauté d’Eugene. Je voulais mettre les mains à la pâte et commencer enfin à travailler avec les paysages et la population locale. Ça a été une opportunité incroyable ! Je pouvais enfin mettre en application tout ce que j’avais appris à la fac ; c’est-à-dire dessiner, installer et gérer des jardins. J’ai également rapidement collaboré avec plusieurs entrepreneurs paysagistes. En parallèle, j’ai commencé à travailler sur mon premier projet, l’installation d’un marché communautaire. Avec trois amies nous avons créé The Whiteaker Community Market, un projet qui rassemble des artisans et des producteurs locaux dans un quartier artistique d’Eugene. Notre souhait était de proposer un système aussi inclusif que possible, grâce à la mise en place d’activités comme le yoga ou encore des cours sur l’art. Nous avons même installé une scène de concert ! Cela fait 5 ans maintenant que ce projet existe, et son importance est plus forte que jamais en cette période de crise. J’ai beaucoup appris de cette expérience, notamment sur la puissance d’un système qui réunit la communauté tout en permettant à chacun de se sentir inclu.


Comment en êtes-vous arrivée à créer Landscape For Humanity?

J’ai rapidement décidé de m’impliquer dans une coopérative de logement, Emerald Village Eugene, un projet entrepris par une association qui s’appelle SquareOne Villages. Il s’agit d’une communauté de 22 micro-maisons. À l’aide d’un entrepreneur paysagiste et des membres de cette communauté, nous avons construit les paysages alentours, et nous avons contribué à la mise en place d’une surface d’agriculture urbaine. C’est un vrai travail de collaboration, les résidents m’ont apporté toutes les recommandations pour définir clairement les axes de travail. De mon côté, je les ai laissé prendre le dessus tout au long du projet, l’idée étant de les responsabiliser. Ce sont eux qui ont fait tout le travail ! Nous avons fini de construire une serre et de planter quelques graines pour faire pousser des légumes juste avant le début de la crise sanitaire. Le confinement a souligné cette importance d’aller vers plus d’autonomie ; par exemple en faisant pousser de quoi nourrir tout une communauté à proximité. Travailler avec ces personnes directement et les accompagner dans la construction de structures adaptées à leurs modes de vie, c’est une expérience incroyable ! C’est d’ailleurs ce qui m’a inspiré à créer Landscape For Humanity. 

Quelle est la mission de Landscape For Humanity ?

Nous travaillons avec différents types de paysage, dans le but de créer des changements effectifs aussi bien d’un point de vue social qu’environnemental. La création de Landscape For Humanity repose sur une collaboration entre des professeurs du département Architecture Paysagiste de l’Université d’Oregon et moi-même. Les professeurs en question faisaient des recherches sur l’installation de paysages dits “productifs” en termes de nourriture, eau et énergie, avec un accent mis sur les communautés disposant de peu de ressources. Pour qu’un projet comme celui-ci puisse se concrétiser, il faut également une équipe sur le terrain, et c’est là que j’interviens. C’est une chance pour moi de travailler avec une équipe aussi qualifiée et de mettre ces recherches à profit des communautés directement sur le terrain.

Sur combien de projets travaillez-vous en ce moment ?

Nous travaillons sur trois différents projets. Le premier c’est bien sûr Emerald Village. Le deuxième projet, Opportunity Village, se passe à Eugene également. Contrairement à Emerald Village qui propose des logements permanents, Opportunity Village offre des logements temporaires et dispose donc de moins d’infrastructures. Les résidents y restent pour une durée très courte. Nous y avons installé des systèmes de filtration des eaux usées et d’irrigation modernes qui permettent d’améliorer la qualité de vie des résidents. Nous avons également créé des espaces de végétation et des jardins. Enfin, le troisième projet est très similaire à Opportunity Village, mais se trouve à Lima, au Pérou. Nous y avons développé des systèmes de bio-filtration permettant d’entretenir un système d’assainissement durable. Pour l’ensemble de ces projets, l’objectif c’est de créer pour et avec la communauté. L’aspect social est un pilier pour notre organisation, et chacun de ces projets repose sur la résilience et l’équité.

Quelle est votre vision pour l’avenir de Landscape For Humanity ?

Je considère l’association comme une ressource pour tous les paysagistes qui souhaitent s’impliquer au plus près des communautés, particulièrement avec des projets difficiles à implémenter. Lorsque je me suis lancée, je n’avais que très peu de soutien de la part des organisations concernées. Le rôle de Landscape For Humanity est avant tout d’aider à combler ce manque, en fournissant aux paysagistes les ressources, les recherches et le réseau dont ils auraient besoin pour mettre en place leurs projets, toujours avec ces considérations sociale et environnementale.

Que vous inspirent les Simone Awards ?

Je suis très heureuse ! Ce prix arrive au bon moment. Il va nous permettre de mettre de renforcer les bases existantes de l’association et d’avancer de façon pérenne. Je suis convaincue que notre travail est nécessaire, particulièrement en ces temps d’incertitude et de changements. Ce don permettra de donner vie à de nombreux projets, je n’ai aucun doute là-dessus !

Justement, comment le prix contribuera-t-il à votre cause ?

Comme je vous le disais, nous souhaitons vraiment développer l’association et accompagner la concrétisation d’une multitude de projets au sein des communautés. Nous allons faire un point sur la situation actuelle de l’association, en tenant compte des changements liés à la crise sanitaire, pour mieux développer notre vision et évaluer les opportunités de partenariats. Nous avons les capacités d’assister dans la mise en place de projets différents sur le terrain. Nous avons les ressources suffisantes pour avancer sur des projets d’assainissement et nous sommes en mesure, de proposer, par exemple, des stations de lavage de mains adaptées à l’espace public. Le prix des Simone Awards nous permettra d’aller plus loin sur ce type de projet.